Pourquoi des taux d’intérêts si élevés en microfinance ?
posté le 7 janvier 2023 par Michel dans ECOLE DE MICROFINANCELes différences entre les banques et les établissements de microfinance.
Les banques financent l’économie
Les banques privilégient le financement des activités existantes en octroyant des prêts à moyen/long terme mais aussi en finançant la trésorerie (par exemple avec l’affacturage : la banque « achète » les factures et se charge de les recouvrer ou avec le financent du stock, les crédits greniers, ou encore avec l’acceptation d’un découvert.)
Les banques font aussi des crédits immobiliers, des crédits à la consommation, des avances de trésorerie et des crédits sociaux …
Les établissements de microfinance ont pour finalité de faire des prêts mais aussi de faire de l’accompagnement.
Les clients des établissements de microfinance sont des auto-entrepreneuriat, des TPE mais aussi des femmes du marché, des emprunteurs ruraux ou encore des artisans qui ont besoin de financer des équipements.
Les établissements de microfinance se distinguent des banques spécifiquement du fait :
- de la clientèle, provenant de couches vulnérables, qui recherche le financement d’une activité génératrice de revenus.
- des montants des prêts très peu élevés .
- de la faible durée des prêts quasiment toujours inférieurs à 12 mois.
- de l’absence de véritables garanties, les garanties étant remplacées par la pression sociale et parfois par des prêts collectifs à un groupe solidaire ou chaque emprunteur garantie l’ensemble du prêt.
- par une excellente connaissance de l’emprunteur par l’établissement prêteur qui enquête sur la moralité et les conditions de vie de ses clients.
- par des taux d’intérêts des prêts très élevés.
Pourquoi les taux d’intérêts sont-ils si élevés en microfinance ?
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Le taux d’intérêt nécessaire à l’autosuffisance financière d’une IMF doit couvrir l’ensemble des charges de fonctionnement (salaires du personnel, loyer de l’agence, couts informatiques, amortissements… ainsi que le coût des formations dispensées) et le coût des pertes sur créances douteuses (cout du risque).
Les coûts de fonctionnement des IMF sont souvent largement supérieurs à ceux des banques du fait du suivi personnalisé de leur clientèle, des remboursements des échéances en espèces ou encore de la nécessité de se déplacer pour visiter les clients dans les zones rurales.
Ils comprennent des charges que les banques classiques ignorent comme les frais de formation et le coût des actions d’accompagnement des emprunteurs, mais aussi les charges liées aux remboursements en espèces à périodicité généralement hebdomadaire.
Outre ces éléments, le niveau élevé de taux d’intérêt pratiqués par les IMF résulte aussi :
- Du coût des ressources pour l’IMF pour constituer le fonds de crédit.
- Du faible rapport des intérêts lesquels même à un taux élevé rapportent peu s’ils portent sur un micro capital, contrairement aux prêts des banques quand le capital emprunté est élevé.
- Des coûts de mises en place du prêt qui nécessitent autant de temps d’analyse du dossier et de procédures pour un micro crédit que pour les grosses transactions
- D’un cout du risque très élevé en particulier lors du premier financement par un micro crédit d’une activité génératrice de revenus.
- De transactions dans des monnaies faibles : il ne faut pas comparer des taux de pays à la monnaie faible avec les meilleurs taux pratiqués dans des pays à la monnaie forte.
Les taux d’intérêts sont donc élevés, ils n’en demeurent pas moins inférieurs au taux de l’usure
Les bénéficiaires des prêts ne se plaignent jamais des taux élevés et préfèrent recevoir des formations et conseils plutôt que de payer un peu moins d’intérêts.
On peut rencontrer des variantes, en particulier dans des IMF dépendant de grandes organisations de solidarité internationale.
Ces organisations caritatives soutiennent que les pauvres ne peuvent supporter des taux intérêts au prix du marché et affichent donc des taux d’intérêts faibles, comparables au taux des pays occidentaux.
Par contre, elles ajoutent de fort couteux frais de gestion, frais de dossiers, annexes ou forfaits… Bien entendu ces frais complémentaires n’apparaissent jamais dans les brochures distribuées aux donateurs.
Comment fixer le taux d’intérêt
La recherche de l’autonomie financière de l’IMF implique que le taux des prêts couvre la totalité des charges opérationnelles et le coût du risque. Si l’IMF ne peut obtenir un taux d’intérêt suffisant, il lui faudra prélever sur le fonds de crédit, lequel petit à petit aura vocation à disparaitre.
La viabilité financière de l’IMF dépend de taux d’intérêt suffisamment élevés.
Bien que tous ces chiffres soient variables selon l’IMF, le pays, le montant du crédit, ou la monnaie, on peut faire un exemple théorique (exprimé en taux annuels) :
Charges opérationnelles de salaires, loyers, consommables | 18% |
Cout de la formation des emprunteurs | 4% |
Cout de la ressource emprunté par l’IMF | 5% |
Inflation, perte de valeur par rapport à la monnaie d’emprunt de la ressource | 5% |
Coût du risque de non remboursement des prêts | 7% |
Pour ce cas théorique, Taux effectif minimum annuel à appliquer serait de | 39% |
Chaque IMF doit procéder à son propre calcul en fonction de ses propres paramètres, pour déterminer le taux minimum correspondant à son mode de fonctionnement.
S’y ajoute en général, sauf en cas de gestion optimale de la part de l’IMF, un coût de la sous-activité du capital c’est-à-dire l’absence de rendement quand les montants ne sont pas prêtés entre les remboursements des uns et la mise en place des prêts nouveaux. Cela peut représenter un taux très élevé en particulier pour des ONG ne disposant pas d’outils de gestion rigoureux.
A l’inverse, certaines IMF bénéficient de la quasi-gratuité de la ressource quand elles sont autorisées à collecter et à recycler l’épargne laquelle est rarement (ou faiblement) rémunérée.
De même les IMF qui reçoivent des subventions ou bénéficient de lignes de crédit subventionnées ou/et de dons de l’aide internationale n’ont pas à emprunter d’où un avantage très important. Il faut toutefois être vigilant car on sait que les subventions n’ont pas vocation à être permanentes, et le jour où elles ne sont plus versées, le risque est grand que l’IMF disparaisse.
On peut donc affirmer que ce sont les programmes qui s’autofinancent, donc qui pratiquent la facturation d’intérêts à taux suffisamment élevés, qui sont les plus performants et les plus efficaces.
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